DU TABOU À L ’OMNIPRÉSENCE DE L’IDÉE DE LA MORT. . .
L’espérance de vie d’une personne en situation de grande exclusion sociale est fortement réduite, elle est généralement estimée autour de 55 ans. Le décès des personnes n grande exclusion est un événement auquel sont confrontés les travailleurs sociaux et accompagnateurs bénévoles. Le sujet décédé n’est plus là pour témoigner et l’incompréhension et la douleur de la mort sont alors portées par l’entourage social qui n’est pas la famille, qui se sent pourtant dans l’obligation morale et, de fait, « d’accompagner jusqu’au bout ». Que faire de ce qui suit le décès d’une personne pour les acteurs de terrain en charge du suivi des personnes décédées ? Que nous enseignent les conditions du décès et les indices de l’état psychique du sujet avant sa mort ? Qu’est-ce que la mort vient révéler de l’histoire subjective ? Comment donner un sens pour les vivants à cet événement ? Quel est l’écho institutionnel du décès d’une personne hébergée et comment l’institution élabore l’après mort ? La question institutionnelle prend une importance considérable lorsque l’on considère qu’il appartient aux professionnels de terrain de traiter de la mort de ces personnes particulièrement isolées. Se pose la question du rapport réciproque entre les accompagnants sociaux et la famille naturelle, beaucoup moins absente qu’on ne pourrait l’imaginer. De même qu’il y a une confrontation avec les familles, accompagner jusqu’au bout exige l’élaboration réciproque du lien entre l’hôpital et la structure d’accueil. Comment s’exprime alors le vécu des acteurs de terrain ?
L’angoisse de retrouver mortes les personnes accueillies n’est pas seulement un fantasme puisque comme nous le verrons, il arrive effectivement de les retrouver décédées dans leur chambre ou à l’extérieur du lieu d’accueil.
A partir de ces difficultés rencontrées, tant institutionnelles qu’individuelles, le décès du sujet en situation de grande exclusion amène une réflexion pour tous les acteurs socioéducatifs, et une meilleure connaissance du parcours de l’exclusion dans toute son humanité et dans certaines de ses modalités d’être. (…)