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“Accès direct” ou “indirect” pour les soins psychiques : les enjeux et les risques

Olivier QUÉROUIL

Année de publication : 2005

Type de ressources : Rhizome - Thématique : Médecine, Psychiatrie, SCIENCES MEDICALES

Télécharger l'article en PDFRhizome n°18 – Pour-parlers, enfance-psychiatrie (Mars 2005)

L’accord conventionnel conclu entre des syndicats de médecins et l’assurance maladie modifie les règles du jeu pour la médecine libérale. Certains autres syndicats contestent vivement ces nouvelles dispositions.

Le « parcours de soins » impose le passage par un médecin traitant choisi par le patient, qui orientera vers les spécialistes, soit dans le cadre d’un avis complémentaire, soit pour des soins itératifs. Ceux ci  devront répondre à un plan de soins défini avec le médecin traitant. La rupture avec la notion de médecin référent antérieure est dans la suppression du financement du généraliste pour ces actions d’orientation et de prévention. Certains médecins spécialistes (gynécologie et ophtalmologie) peuvent rester en « accès spécifique », consultés directement par les assurés (pour certains actes) sans que ceux-ci soient moins bien remboursés, contrairement à l’ensemble des autres spécialistes.

Le passage obligatoire par le médecin traitant ne va pas de soi : les consultants souhaitent souvent garder une certaine discrétion sur leurs difficultés, voire s’en tenir sur ces sujets à la stricte confidentialité garantie par le secret médical. Les rendez-vous en cascade risquent d’accentuer les retards dans l’accès aux soins, et les difficultés à consulter. Le point précis que nous abordons ici est de savoir si le demandeur de soins devra passer par son médecin référent pour accéder au psychiatre, le soin étant dans ce cadre fondamentalement relationnel ! La notion de plan de soin protocolaire apparaît ici proche de l’absurdité.

La question n’est pas encore tranchée à ce jour, mais le protocole fixe la date limite du 1er mars pour l’avenant conventionnel : que va-t-il se passer à cette date ? L’assurance maladie semble tenir à ce passage par le médecin traitant, avec notamment deux arguments, très éloignés des pratiques de soins :

§ Les consultations en psy sont souvent récurrentes, et peuvent représenter des dépenses  importantes pour l’assurance maladie.

Mais comment l’assurance maladie pense pouvoir déterminer le nombre de séances convenable à telle ou telle situation ? Si l’idée est de définir le rôle du psychiatre, uniquement dans sa fonction diagnostique et de prescription des soins, la prise en charge étant réalisée par un autre, comment réaliser la continuité relationnelle ?

§ Les médicaments prescrits en psychiatrie induisent de nombreux problèmes d’interaction avec les médicaments prescrits en médecine somatique : le Dossier Médical Partagé doit permettre d’informer les autres prescripteurs des traitements en cours, et éviter certains risques. L’argument est à la fois incontestable (mais on pourrait se limiter à l’indication des prescriptions dans le DMP), et un peu court : les études de l’assurance maladie elle-même ont montré depuis longtemps que les médecins généralistes étaient les plus forts prescripteurs de médicaments de la sphère psy.  Le problème des mauvaises prescriptions et des interactions médicamenteuses n’est toutefois pas spécifique à la psy, même si elle constitue un terrain de choix pour des offensives de la publicité pharmaceutique (médicaments à usage de conformité sociale et de bien être, comme la Ritaline, les anti-dépresseurs, etc.).

La possibilité pour le patient de consulter en « accès direct », hors parcours de soins coordonnées, le met dans le cas de figure général des spécialistes pour lesquels les dépassements sont admis avec une base de remboursement plus faible pour l’assuré. C’est donc le risque d’un effet dissuasif majeur dans l’engagement aux soins pour les personnes ayant des revenus moyens et modestes qui sont la majorité. C’est donc un recul dans l’accès aux soins pour tous, doublé d’une incompréhension sur la spécifité de la demande de soins en psy.

Enfin nous constatons que n’est pas traitée la question des praticiens de service public (très nombreux en psychiatrie). Quelle est leur place dans ces nouvelles pratiques conventionnelles ? Quelle place au service public ?

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