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Les liens entre alimentation et santé mentale, une (r)évolution possible en psychiatrie

Vanessa Evrard - Pair-aidante en santé mentale, cofondatrice du Réseau sur l’entente de voix Lyon (REV),fondatrice de Oh My Gut !

Année de publication : 2025

Type de ressources : Rhizome - Thématique : SANTE MENTALE

Télécharger l'article en PDFRhizome n°93 – Être bien dans son assiette

Rhizome : Pouvez-vous décrire, à partir de votre expérience personnelle, les liens existants entre les problèmes digestifs et les troubles de santé mentale ?

Vanessa Evrard : Depuis mon enfance, je suis confrontée à des troubles émotionnels, de l’apprentissage, du comportement et des problèmes digestifs graves, tels que des ballonnements, des diarrhées, de la constipation, une alimentation déséquilibrée ainsi que des addictions, notamment alimentaires. Ces symptômes sont souvent liés aux troubles du spectre autistique ou de la schizophrénie.

Selon moi, mes troubles de santé mentale sont directement liés à mes intolérances alimentaires et à mes problèmes digestifs. J’ai déclaré une intolérance sévère aux produits laitiers et au gluten – souvent en corrélation – enfant, que je n’ai pu diagnostiquer qu’à 30 ans. La mauvaise assimilation des nutriments, des vitamines et des minéraux crée un déséquilibre. La migraine, la vulnérabilité face au stress, la dépression et l’anxiété sont liées à une mauvaise santé digestive.

Les problèmes digestifs que j’ai rencontrés m’ont amené à un régime sans gluten depuis quinze ans. Je limite également les produits laitiers et me détoxifie (en buvant des jus frais de légumes et de fruits, par exemple). Je consomme des probiotiques et des compléments alimentaires conseillés par mon nutritionniste. Je prends aussi du plaisir à cuisiner alors que cela n’a pas toujours été le cas. Du fait de mon intolérance au gluten, mon rapport à l’alimentation a pu être compliqué, notamment au restaurant ou lors de repas entre amis. Aujourd’hui, j’éveille mes sens aux parfums, couleurs et textures. Lorsque je cuisine, je suis adepte de l’assiette « arc-en-ciel ». Au menu, des protéines animales, beaucoup de légumes, du bon gras (principalement d’origine animale, mais aussi végétale, en utilisant la graisse de noix de coco, par exemple), quelques fruits et de la pleine conscience (je ne regarde pas la télévision au moment des repas, par exemple). En tant qu’usagère de la psychiatrie, je n’ai jamais eu de proposition d’accompagnement diététique, et ce, malgré mon intolérance au cours de mon hospitalisation. J’aborde donc mes problèmes digestifs avec mes praticiens et leur parle volontiers du lien entre l’alimentation et la santé mentale.

Rhizome : Comment les traitements médicamenteux impactent-ils le rapport à l’alimentation des personnes usagères en psychiatrie ?

Vanessa Evrard : Les traitements psychiatriques de type neuroleptiques ont tendance à provoquer des troubles du transit (tels que des constipations, de la diarrhée ou des ballon- nements, par exemple) et souvent une prise de poids conséquente1. Ainsi, environ 40 % des personnes vivant avec une schizophrénie souffrent de constipations ou de troubles digestifs graves induits notamment par les neuroleptiques. De plus, ces traitements ont tendance à ouvrir l’appétit et à enlever le sentiment de satiété, ce qui complique l’alimentation, crée de la frustration et favorise la prise de poids.

En tant que pair-aidante, je suis souvent amenée à aborder les effets secondaires cités. Cela me permet de partager mon savoir expérientiel vis-à-vis des troubles et du lien entre la santé mentale et la santé de notre microbiote. Au vu de l’impact de l’alimentation sur la santé mentale, il est nécessaire que les professionnels en santé mentale soient formés à la nutrition, sujet plus que jamais d’actualité.

Notes de bas de page

1 Morin, A. (2017). Les troubles digestifs graves induits par les neuroleptiques [mémoire, faculté de pharmacie d’Aix-Mar- seille Université]. Dumas

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