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Accompagner la transmission professionnelle

Ethel SWISZKA - Formatrice au Centre National de Formation et d’Etude de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (CNFE)

Année de publication : 2005

Type de ressources : Rhizome - Thématique : TRAVAIL SOCIAL

Télécharger l'article en PDFRhizome n°20 – Pratiques d’accompagnement (Septembre 2005)

Ce que nous appelons désormais « Dispositif Equipe Ressource » a été crée 2001 au CNFE, pour offrir une réponse contextualisée au désarroi, voire à la souffrance des nouveaux personnels souvent majoritaires dans les services d’hébergement.

Depuis sa création, le dispositif a porté différents noms : « Equipe ressource : apprentissage collectif du travail en équipe dans le cadre de la formation continue » puis « Equipe ressource : accompagnement à la prise de fonction ». Nous avons créé un dispositif d’étayage qui implique des professionnels de la PJJ du département du Nord. Un collectif de professionnels « aguerris » venus de services différents du Nord et constitué en équipe accompagne un collectif de nouveaux professionnels d’un même service qui veut se constituer en équipe.

Au plan institutionnel, le dispositif articule des instances significatives de la PJJ : les directions régionale et départementale, l’école de formation nationale et territoriale, les services éducatifs. Trois points d’ancrage pour accompagner de jeunes professionnels à « faire équipe ».

Au plan de sa mise en œuvre, le dispositif articule trois niveaux :

Au premier, trois personnes de l’école : deux du national et une du Nord. Au deuxième, trois personnes et des professionnels de différents services du Nord ; c’est l’équipe ressource. Enfin au troisième, le grand groupe de travail où l’équipe ressource reçoit les professionnels d’un même service du Nord, c’est l’équipe accueillante.

Les articulations, d’une part entre les instances institutionnelles et d’autre part entre les niveaux du dispositif font accompagnement car, sur les questions éducatives, elles permettent à la parole de circuler. Ainsi se crée une parole collective.

Si l’accompagnement est une action qui vise à combler les manques nés des difficultés sociales, alors notre dispositif est bien d’accompagnement. Il cherche à pallier un manque avéré, celui de collectifs de travail constitués en équipe aux conséquences connues et subies : les foyers  sont exsangues, les jeunes hébergés y prennent le pouvoir, les congés de maladie tombent en chapelet ; les demandes de mutation occupent la moitié d’une année et immobilisent des personnels en les sidérant d’espoir et de frayeur quatre mois pleins ; donc une instabilité des adultes dans des services qui ont vocation à permettre à un adolescent de vivre son présent dans une stabilité assise pour envisager son avenir.

Qu’entendons-nous par stabilité dans une équipe d’éducatifs en foyer (éducateur, veilleur de nuit, cuisinier, secrétaire, psychologue, directeur) qui accueille un groupe d’une douzaine de jeunes placés là par un juge des enfants, sous mandat judiciaire ? Deux sens : le premier est réglementaire, les personnels doivent rester au moins deux ans dans un même service ; le second est éducatif et nous le retenons. Il signifie que les relations entre les adultes du foyer sont suffisamment « liées » pour qu’un jeune puisse s’y confronter.

Dans l’équipe ressource, nous éprouvons nos liens lorsque, avec l’équipe accueillante, nous travaillons les situations éducatives qu’elle nous propose. De fait, des divergences s’expriment dans les croisements des souvenirs et des compréhensions surgis du récit que nous accueillons. Elles ne mettent pas en cause notre persévérance à être ensemble. Au contraire, les dissensus circulent constamment dans les trois niveaux du dispositif sur des registres différents.

Autrefois, le « faire équipe » s’apprenait dans un enchaînement entre des générations de professionnels. Il se faisait automatiquement, croyait-on, car il ne se voyait, ni dans les heurts qu’il aurait pu produire, ni dans ses bienfaits. Faire équipe était un « déjà là » invisible. En entrant dans une équipe, on en devenait membre. Bien entendu, des processus de constitution d’équipe étaient à l’œuvre mais pas décrits. Aujourd’hui, on veut voir ce qui se passe, on veut tout voir, on doit tout donner à voir, on doit être visible et lisible. Nous étions dans un temps infini où notre futur était tributaire d’un passé connu et nous voici dans l’immédiat, sommés d’inscrire des traces.

Entre des générations différentes de professionnels, l’équipe ressource veut laisser aux processus du « faire équipe » le temps de se dérouler.

Dans le grand groupe, la contrainte est de travailler au présent les situations éducatives vécues au foyer de l’équipe accueillante. Pas de leçon, pas de legs, rien que du présent pour parler ensemble de ce que nous comprenons du métier d’éducateur. Dans ce présent à construire, nous nous formons mutuellement à « faire équipe ».

Nous sommes dans l’accompagnement en comblant un manque dans l’apprentissage du métier d’éduquer car nous vivons ensemble les processus du « faire équipe ». Mais cet accompagnement ne contient pas plus la transmission d’un passé que celle de valeurs. Nous voulons quitter les clivages entre « eux » les nouveaux et « nous » les aguerris, entre « l’âge d’or » où « nous » aurions su travailler le relationnel et « aujourd’hui » où « eux » sur-règlementeraient la vie des jeunes. Quitter les représentations et se rejoindre en un même lieu au temps présent pour faire équipe.

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