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Quand le travail en réseau facilite l’accès aux soins

Dominique ARNAUD - Psychiatre, chef de service, CH Montfavet (Vaucluse)

Année de publication : 2007

Type de ressources : Rhizome - Thématique : Psychiatrie, Psychologie, Santé publique

Télécharger l'article en PDFRhizome n°28 – Ruralité et Précarité (Octobre 2007)

Comment promouvoir, autant que faire ce peut, l’accessibilité aux soins pour la population « d’un territoire de santé » vaste, rural, où les moyens de communication ne sont pas toujours rapides et faciles ? Notre secteur s’étend de Carpentras, pôle urbain du territoire de proximité, aux contreforts du Ventoux, zone agricole et viticole. La population qui y réside est en croissance régulière (+ 9,8 % de jeunes) ; 54 % des foyers ne sont pas imposés. L’hospitalisation temps plein est située au Centre Hospitalier de Montfavet, peu accessible pour une population sans moyen de locomotion.

L’offre de soin sur la cité se décline ainsi : un Centre Médico Psychologique ouvert du lundi au vendredi avec une ouverture plus large un soir de la semaine ; un Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel ; deux Hôpitaux de Jour, dont un de gérontopsychiatrie ; une Unité d’Accueil des Urgences Psychiatriques sur le pôle santé de Carpentras associant hôpital général et polyclinique privée.

Dans une première phase, face à l’étendue du territoire, nous avions implanté des présences infirmières sur deux villes voisines du Ventoux. Force a été de constater l’inefficience du dispositif : seuls un ou deux patients psychotiques chroniques connus et traités de longue date y étaient traités ; bien qu’inscrits sur les Centres médico-sociaux locaux, ils étaient devenus des lieux de stigmatisation de la pathologie mentale. Pour les vauclusiens, le Centre Hospitalier de Montfavet c’est « Mondevergues », lieu d’enfermement des fadas et des fous furieux (du fait de l’implantation d’une unité pour malades difficiles sur le site). Même le Centre Médico-psychologique est pour eux un lieu de stigmatisation de la pathologie mentale : « Un voisin a appris que je venais au CMP, depuis il ne me parle plus, il dit que je suis fou ».L’unité d’accueil des urgences psychiatriques implantée à l’hôpital général échappe à cette règle et de fait.

Comment développer l’accès aux soins dans ce contexte?

La mise en place d’un travail en réseau nous a permis, pour partie, de répondre à cette question. Une décompensation hétéro-agressive d’un patient psychotique en rupture de soin, admis en CHRS, nous a permis, autour des notions de dangerosité et de secret professionnel, après un temps de concertation et de mise à plat du conflit entre institutions, de développer un site d’information sur la pathologie mentale. La désertion socioprofessionnelle, la « clochardisation » au sein d’un village permet le plus souvent la rencontre avec les responsables locaux et la mise en place d’une coordination où s’associent les bonnes volontés locales et le savoir-faire des équipes de soin. Cela nécessite disponibilité et réactivité. Notre équipe se déplace ainsi sur les différents points du territoire.

Au-delà du travail en lien avec les partenaires sanitaires et médico-sociaux du territoire (CMS, réseau addictologie, tuteurs, médecins généralistes libéraux), nous avons développé une articulation avec le CHRS (réunion de supervision des animateurs), le milieu scolaire (rencontres régulières avec les professeurs de l’équipe d’adultes-relais du lycée), la justice et les forces de l’ordre (gendarmerie nationale, police nationale et police municipale), par le biais de rencontres autour de la loi de 90, de son application, et par la visite du service. Ainsi, dans le respect des fonctions et missions de chacun, un élu, un représentant des services sociaux, de l’éducation nationale, des forces de l’ordre, peut nous interpeller directement et évoquer avec nous une problématique locale dont la description se termine souvent par la phrase : « vous croyez que c’est pour vous ? ». Ces quelques mots facilitent une première évaluation de la situation et l’ébauche d’une concertation pour la mise en place éventuelle d’une première rencontre infirmière.

Ainsi, notre choix d’intervention actuel est fortement articulé par un travail en réseau qui, seul, permet une réactivité acceptable au regard d’une part de la géographie de notre territoire et d’autre part de la nécessité d’une réponse adaptée que nous souhaitons de qualité.

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