I. INTRODUCTION
De l’exil à l’asile, l’individu parcourt un trajet difficile, voire destructeur. La terre d’asile est certes le refuge d’une vie menacée dans le pays d’origine, mais elle est également source d’autres menaces. L’individu exilé, qui devient généralement demandeur d’asile, se retrouve avec une vie à reconstruire alors qu’il ne dispose d’aucune ressource. Et, tant que cette nouvelle vie ne bénéficie pas de fondations solides, l’individu déraciné et démuni reste vulnérable. Cette fragilité met en danger sa santé, tant physique que mentale.
Observant l’inadaptation des structures de soins « classiques » face aux besoins des personnes démunies, les organismes de la santé ont mis au point des structures facilitant le recours au système de santé de ces personnes. Dans cette optique les permanences d’accès aux soins de santé ont été créées. Elles dispensent de soins à visée physique et psychique.
Cette présentation traitera des soins à visée psychique et plus particulièrement de la prise en charge psychiatrique de personnes majoritairement en demande d’asile, personnes exilées de leur terre d’origine et exclues de leur terre d’accueil, au sein des permanences d’accès aux soins de santé (PASS), à partir d’une expérience de six mois en tant que consultant psychiatrique à la PASS de Dijon.
Le psychiatre, lorsqu’il se retrouve face à un sujet étranger et de surcroit, exclu, peut se trouver lui-même démuni. La pathologie prend un visage qu’il ne connait pas, les problématiques psychiques diffèrent de celles rencontrées dans la pratique « courante », et les outils thérapeutiques nécessitent d’être revisités. Comment le domaine psychiatrique s’insère-t-il dans le cadre des PASS ? Quelle place pour la psychiatrie dans le domaine de l’exil et de l’exclusion ? Pourquoi et comment le psychiatre doit-il adapter sa pratique ?
Dans la première partie, nous présenterons, après avoir définit les liens entre santé mentale, exil et exclusion, les permanences d’accès aux soins de santé et leurs objectifs en matière de santé générale et mentale. La deuxième partie rendra compte d’une pratique psychiatrique illustrée à partir d’un cas clinique. La troisième et dernière partie s’ouvrira sur une réflexion sur cette pratique dont la spécificité tient à son public, les demandeurs d’asile. (…)