Dans le cadre d’une pratique d’assistante sociale dans un service de soins en pédopsychiatrie
depuis trente ans, j’ai pu éprouver ces dix dernières années à la fois malaise et difficultés
pour ajuster ma fonction au public de familles et d’enfants accueillis au CMP (Centre Médico
Psychologique) et inscrit dans des trajectoires migratoires souvent complexes et
douloureuses marquées par une précarité psychique et sociale.
L’exclusion, conséquence de leur vulnérabilité sociale et administrative dans l’attente d’un
droit de séjour et d’un hébergement est doublée le plus souvent pour les familles consultant
au CMP, de l’exclusion, conséquence de la psychopathologie du ou des enfants. En effet, le
parcours des enfants atteints de troubles sévères du développement fait aussi intervenir une
représentation du sujet social fragile, menacé dans un statut souffrant, dégradé, déficient
parfois et désaffilié socialement. L’équipe va proposer une place dans le soin à l’enfant,
tout d’abord difficilement pensable dans un ailleurs et ensuite, avec des tentatives d’aménagement d’inscription sociale en crèche ou à l’école. Ces chaos successifs dont nous
sommes témoins et notre impossibilité à changer le cours des choses imposent de suivre et
accompagner, par l’ajustement de nos pratiques, ces bouleversements dont nous sommes
témoins.
Je propose dans un premier temps de présenter les missions de notre service et la fonction
de l’assistante sociale pour développer ensuite les incidences des nouvelles législations sur
les publics précaires, spécifiquement les migrants précaires. Pour mettre en évidence
l’évolution de nos pratiques de soins et d’accompagnement social, je choisis d’évoquer nos
interrogations à partir de trois situations de familles adressées au CMP sur une période de
treize ans. (…)