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Une équipe mobile orientée rétablissement

Émilie LABEYRIE - Psychologue clinicienne, coordinatrice, Équipe MARSS, AP-HM, Marseille

Année de publication : 2018

Type de ressources : Rhizome - Thématique : Psychologie, PUBLIC PRECAIRE, SCIENCES HUMAINES

Télécharger l'article en PDFRhizome n°68 – « Aller vers »… d’autres pratiques ? (juin 2018)

L’équipe MARSS s’est créée en 2004 à partir d’une équipe de bénévoles de l’ONG Médecins du Monde (MDM) qui effectuait des maraudes. Progressivement, elle s’est institutionnalisée en devenant une EMPP en 2007, avec un statut d’unité fonctionnelle hospitalière de l’AP-HM1. En termes d’effectif, elle se différencie des autres EMPP françaises par le nombre élevé de professionnels qui la composent et par la présence de médiateurs de santé/travailleurs pairs2.

L’EMPP est un service psychiatrique dans la rue. Elle rencontre des personnes sans-abri présentant des troubles psychiatriques sévères et exclus du système de soins et des prises en charge sociales. Ses deux principes d’action sont d’« aller vers  » et de travailler en partenariat avec le secteur social. L’idée est de proposer un accompagnement et une continuité dans les soins en santé mentale de proximité vers des structures bas seuil, ceci afin de favoriser une politique de réduction des risques et des dommages en santé mentale. L’EMPP se base sur des théories de pratiques plus individualisées. Elle se centre sur le développement de compétences psychosociales en travaillant sur l’estime de soi, les responsabilités, l’intelligence émotionnelle, l’empathie, la résilience et la gestion du stress. Des objectifs adaptés, définis avec l’usager, sont mis en place  : avoir une vie satisfaisante, être un citoyen comme les autres, s’intégrer dans la communauté, développer sa capacité à se gérer soi-même, entreprendre des activités sociales, se redéfinir et reconstruire un sens de soi… Ce travail d’introspection passe par la mise en place de critères d’action tels que l’espoir, le pouvoir d’agir, le bien-être, le bonheur, l’autonomie… L’axe principal de la prise en charge vise l’amélioration du fonctionnement psychique et social de la personne pour consolider sa place et son statut dans la société, afin de retrouver une reconnaissance. C’est de la psychiatrie au plus près de la parole de l’usager et de ce qu’il a à dire de sa souffrance psychique sur la scène sociale, soit respecter son temps ainsi que sa manière de s’exprimer par l’acte ou le désordre chaotique qu’il éprouve. Ceci n’empêche pas le travail clinique de contenance et de soins psychiques, comme celui d’évaluation d’une symptomatologie ou de la mise en place de traitements médicamenteux vers une hospitalisation.

La «  non-demande  » dans une perspective de rétablissement

Les choses importantes pour créer un lien de confiance sont d’abord de se baser sur les besoins primaires de la personne (manger, dormir, hygiène, sécurité…) et de créer une dynamique dans la relation grâce à une écoute attentive. C’est seulement ensuite qu’une demande sanitaire et sociale peut émerger. Il faut considérer la personne comme un sujet désirant et non plus celle «  d’objet déchet  » à laquelle la société l’assigne. Cela passe donc par l’apport de soins de proximité en santé mentale et somatique  : diagnostics, entretiens, soins, prévention, réduction des risques.

On rétablit les droits sociaux. On propose un accompagnement dans les soins (consultations spécialisées, hospitalisations), dans le projet de vie mais aussi à domicile ou dans des lieux d’hébergement. La pratique s’axe sur la personne vers une visée d’autodétermination et d’autogestion. C’est une vision holistique, centrée sur le corps, l’esprit et la communauté, vers une réflexion globale de la prise en charge. La pathologie psychiatrique n’est pas vue de manière déficitaire. Le rapport singulier au monde dans lequel évolue la personne est pris en compte dans l’ici et le maintenant. Pour cela, l’engagement dans la relation est nécessaire. C’est un travail de réassurance qui ne doit jamais perdre de vue, l’importance du choix donné à la personne  est un processus vers la responsabilisation. L’approche est fondée sur les forces de la personne dont elle reconnaît la dimension existentielle de la crise psychotique, afin de donner un sens à ce qui est éprouvé.

Notes de bas de page

1 Le partenariat avec MDM a pris fin en 2011.

2 En 2012, un programme expérimental est dirigé par le Centre collaborateur OMS France pour la santé mentale (CCOMS), ayant pour objectif la création d’une nouvelle profession, la transformation des pratiques et des représentations des équipes de psychiatrie publique. Les médiateurs de santé pairs sont embauchés dans les équipes hospitalières comme facilitateurs de la création, la restauration et le renforcement du lien avec l’usager par leurs savoirs expérientiels. Ils représentent le rétablissement incarné pour lutter contre la stigmatisation de la maladie mentale.

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