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Edito

Jean FURTOS

Année de publication : 2011

Type de ressources : Rhizome - Thématique : SCIENCES HUMAINES, Sociologie, Sciences politiques, Psychiatrie, SCIENCES MEDICALES

Télécharger l'article en PDFRhizome n°42 – L’Age post-thérapeutique (Septembre 2011)

Serions-nous rentrés à grands pas dans l’âge post-pathologique, c’est à dire post-thérapeutique, de la psychiatrie ? Pour quelles raisons et avec quelles marges de manœuvre, voilà l’axe autour de quoi tourne ce Rhizome, dont la construction a bien sûr été déclenchée par l’attente de la nouvelle loi sur les soins sous contrainte du 5 juillet 2011.

Comme le souligne Pierangelo Di Vittorio, depuis les origines de la psychiatrie, traiter le fou comme un homme et gérer la maladie comme une dangerosité a structuré l’histoire de la discipline ; il y a là une contradiction constitutive surmontée avec plus ou moins de bonheur, selon les situations.

Mais lorsque le principe de précaution et la peur de l’autre, ces deux leviers de la paranoïa sociale, font basculer l’équilibre du côté de la mise hors d’état de nuire d’un humain devenu « un produit dangereux » (Bernard Lachaux), alors apparaît le risque majeur d’abandonner le dangereux hors de son humanité et de son histoire, transformant au passage le soignant en prestataire de service.

C’est pourquoi il est absolument nécessaire de préserver une marge de négociation entre cette logique d’exclusion et l’éthique du soin psychique. Comment les demandes de soins sous contrainte, malgré l’asymétrie de la position du patient, peuvent-elles rester en interaction d’humanité partagée avec les familles, les professionnels d’horizons divers et leurs réseaux, les élus, sans oublier les juges et les représentants de l’Etat ? Comment y introduire la dimension du temps et sa mobilité sans être figé, tétanisé par la peur de la faute ? C’est toute la difficulté et l’enjeu. Nous avons en tous cas le devoir de ne pas abandonner à la réification dangereuse toute une catégorie de personnes au seul bénéfice d’une sécurité supposée complètement maîtrisée, donc imaginaire.

Une dernière question dont l’audace ne doit pas nous empêcher de la penser : comment comprendre que la responsabilité du mal porte de plus en plus sur l’individu dangereux (le fou, l’étranger, le fumeur, l’automobiliste…) ? Pourquoi cette insistance morbide à focaliser l’attention médiatique sur l’absence de contrôle des pulsions de tel ou tel quidam, de telle ou telle célébrité ? Le dernier article de ce numéro porte sur la mondialisation, il nous ouvre une piste : on observe, cela n’est pas un scoop, une abdication du politique sur les flux spéculatifs non régulés, avec un laxisme éminemment périlleux sur l’avidité et la toute-puissance de ceux qui sont aux manettes. Notre hypothèse est la suivante : l’obligation du contrôle, principe de civilisation, reviendrait par la fenêtre de l’individu, selon l’idée que c’est lui, l’individu isolé, qui fait la richesse comme le malheur des nations. On devine où serait le vrai courage politique : remettre la régulation à la bonne place, à l’articulation de l’individu et du social.

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