Les Restos du Cœur sont l’une des principales associations de solidarité en France et représentent environ 35 % des volumes d’aide alimentaire distribués dans notre pays. En 2023-2024, ce sont 163 millions de repas qui ont été distribués au sein d’environ 2 300 lieux d’accueil par plus de 75 000 bénévoles, contre 142 millions il y a encore deux ans. L’association a accueilli l’année dernière 1,3 million de personnes, appartenant à 575 000 ménages1. Ce chiffre représente quelque 200 000 personnes de plus qu’il y a deux ans, période à laquelle les Restos avaient alors dû prendre des mesures de freinage consécutives au choc inflationniste.
Depuis 2017, une stabilité dans le profil des personnes accueillies…
Le public accueilli aux Restos du Cœur est marqué par sa jeunesse, 39 % des bénéficiaires sont mineurs. La répartition par âge ne varie guère d’une année sur l’autre, environ 57 % des personnes accueillies ont moins de 30 ans. Au cours des campagnes 2023-2024, nous avons compté 103 398 familles ayant au moins un enfant de moins de 3 ans. C’est un nombre total de 128 248 enfants de moins de 3 ans qui sont accueillis aux Restos du Cœur, représentant près de 10 % des personnes accueillies et environ un quart des bébés nés dans une famille pauvre en France. Les moins de 3 ans représentent actuellement presque 25 % des mineurs accueillis.
Les Restos du Cœur accueillent une population diverse, mettant en avant l’hétérogénéité des formes de précarité telles que :
- les familles monoparentales, qui représentent une part croissante des demandes d’aide ;
- les travailleurs précaires, dont le revenu ne suffit plus à couvrir les besoins essentiels ;
- les étudiants, de plus en plus nombreux à solliciter une aide alimentaire ;
- les seniors, victimes de pensions insuffisantes et de l’augmentation du coût de la vie ;
- les personnes migrantes (demandeuses d’asile et réfugiées), dont les besoins d’accompagnement sont
Ces dernières années, l’association a connu une hausse de la fréquentation de l’ensemble des profils, sur toutes les catégories d’âge et sur tous les territoires, en milieu rural comme urbain.
… mais des conditions de vie de plus en plus dégradées
Le logement constitue l’un des principaux vecteurs d’exclusion sociale en raison de sa place centrale dans la vie quotidienne des individus — qu’il s’agisse de leurs relations sociales, de leur activité professionnelle ou de la scolarisation des enfants. Aux Restos du Cœur, 40 % des familles accompagnées rencontrent des difficultés liées au logement, un chiffre qui grimpe à 47 % pour celles ayant des enfants âgés de 0 à 3 ans.
L’ensemble des familles accueillies au Restos vit en dessous du seuil de pauvreté et 70 % d’entre elles vivent avec deux fois moins que le seuil de pauvreté (soit 608 euros), ce qui constitue une aggravation de 10 points par rapport à l’année précédente (60 %). Près de 30 % des familles déclarent vivre sans aucune ressource. Environ 35 % des familles n’ont plus de ressource une fois le loyer et les charges payées. Ainsi, l’impact du choc inflationniste2 a été particulièrement violent pour l’ensemble de ces personnes dont les ressources sont extrêmement basses ; il a pu être à l’origine d’un véritable basculement dans la grande pauvreté. C’est une tendance lourde que nous observons depuis la crise sanitaire : les trajectoires de précarité des personnes en difficulté ont eu tendance à s’accélérer et à devenir plus complexes encore. Cette situation rend par ailleurs particulièrement pertinente et indispensable la gratuité totale de l’aide apportée par les Restos du Cœur.
L’aide alimentaire est la porte d’entrée d’un accompagnement plus large
L’aide alimentaire permet d’apporter une aide d’urgence, mais représente aussi le point de contact privilégié pour favoriser l’inclusion sociale des plus démunis et les sortir de la pauvreté. Le lien de confiance tissé par les bénévoles avec les personnes accueillies permet de lutter contre l’isolement : nous avons pu mesurer que 8 personnes sur 10 venant à l’aide alimentaire des Restos voient leur situation d’isolement reculer. De nombreuses personnes accueillies deviennent d’ailleurs elles-mêmes bénévoles : nous estimons qu’environ 15 % des bénévoles sont par ailleurs accueillis. Cette aide alimentaire permet également d’aller plus loin dans l’accompagnement et d’identifier les besoins des personnes, de proposer des solutions pour y répondre et de constituer une première marche indispensable vers l’insertion : de l’accès à l’emploi et au logement jusqu’à l’accès à la culture, aux loisirs et aux vacances, en passant par l’accès aux droits, les Restos déploient une multitude d’actions pour permettre aux per- sonnes accueillies de reprendre pied durablement.
Ainsi, de l’aide d’urgence à l’insertion durable, les Restos se battent contre la pauvreté sous toutes ses formes, mais il reste de la responsabilité des pouvoirs publics de lutter contre la pauvreté à la racine, de prévenir le basculement dans la précarité et, in fine, le besoin d’aide alimentaire.
Notes de bas de page
1 L’Observatoire des Restos. (2024). Caractéristiques des personnes accueillies aux Restos du Cœur. Campagne 2023-2024. L’Observatoire des Restos.
2 La France a connu une vague d’inflation débutée fin 2021, qui a culminé entre fin 2022 et début 2023, marquée par une forte hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation. Les produits les plus touchés par cette inflation ont ainsi été ceux du quotidien, achetés régulièrement par les ménages. Insee. (2025). L’essentiel sur… l’inflation. Insee.
Bibliographie
Arnal, C., Neybourger, P., Perronnet, C. et Verdier, C. (2023). Étude sur l’utilité sociale de l’aide alimentaire. L’Observatoire des Restos.