I. Introduction et problématique
Infirmière dans un service accueillant des Mineurs Non Accompagnés (MNA) depuis quatre ans et demi, j’ai vu passer un certain nombre des jeunes hommes et jeunes filles, des adolescents devenus adultes avant d’être majeurs.
Par choix, poussés par les événements, ou encore mandatés par un rêve, une famille, un espoir de meilleur vers une terre « idéale » ; ils entament un parcours migratoire souvent traumatique, fait de questionnements, d’angoisses, et trop souvent, au regard des témoignages, empreints de violences physiques et/ou psychiques.
Ils arrivent sur une terre « promise » qui ne peut tenir aussi simplement les promesses véhiculées par d’autres migrants. Le rêve vendu est souvent bien loin de la réalité vécue. Ils arrivent abîmés, et à cette souffrance parfois visible parfois silencieuse, se rajoutent les difficultés administratives, les différences culturelles, la langue et d’autres obstacles avant que ces jeunes puissent nous dire : « Je vais bien ».
J’ai eu la chance lors d’un entretien infirmier de découvrir Mamadou (1) et son histoire. Il était venu pour l’entretien de santé que je fais à l’accueil d’une nouvelle arrivée sur notre service. En lui présentant les différents intervenants qu’il pouvait rencontrer et évoquant le rôle de la psychologue au sein de notre unité, j’ai senti un repli sur lui-même et lui ai demandé s’il voulait qu’on arrête l’entretien que l’on pourrait reprendre ultérieurement.
Mamadou a souhaité poursuivre et m’a demandé s’il pouvait me raconter ce qu’il a vécu et pourquoi il se sent triste à cet instant. Son témoignage fut le point de départ de ma réflexion. (…)