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Introduction
Depuis 2015, les afflux de migrants n’ont cessé d’être au cœur de l’actualité politico-médiatique et de susciter des controverses sur l’accueil qui doit leur être fait, et sur les moyens de cet accueil. On a parlé d’une « crise des migrants » pour caractériser ces arrivées massives qui ont lieu en Europe depuis la fin du printemps 2015, résultant pour partie seulement des déplacements de population provoqués par la guerre en Syrie. Les médias ont été un opérateur important de la publicisation et de la politisation de cette crise, qui a concouru largement à faire apparaître ces nouveaux arrivants comme des « intrus vulnérables » ou « dangereux » (Georgiou et Zaborowski 2017), sans qu’on s’intéresse plus avant à la complexité du phénomène migratoire, à ses causes et à ses conséquences.
Le grand public s’est alors trouvé confronté à la violence de la migration, déjà connue des nombreux professionnels, bénévoles et militants du champ de la demande d’asile et de la migration. C’est là un premier paradoxe : cette exposition médiatique rend publiques des injustices, des contradictions dans les “politiques d’accueil”, des réalités de vie insoutenables, notamment dans les camps. Mais elle permet dans le même temps une prise de conscience et une possibilité d’agir. Du côté des professionnels impliqués sur le terrain ou des chercheurs enquêtant sur des problématiques en lien avec la migration, un consensus émerge : nous avons moins affaire à une “crise des migrants” ou une “crise de la migration”, qu’à une “crise de l’accueil” de ces migrants. Le décalage du cadrage interprétatif n’est pas sans conséquence.
D’une part, si crise il y a, elle ne date pas de 2015. Les demandes de protection à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ont été multipliées par 3 entre 2007 et 2020. Et selon Catherine Wihtol de Wenden (2010), les migrations internationales ne peuvent que se poursuivre dans la mesure où les facteurs de mobilité ne sont pas près de disparaître : écarts entre les niveaux de développement humain, crises politiques et environnementales, etc. La sémantique de la “crise des migrants” suggère un horizon de “sortie de crise” qui en passerait par une baisse du nombre des migrations, ce qui n’est pourtant pas a priori un horizon probable.
D’autre part, cette “crise de l’accueil” peut s’entendre comme une opportunité pour changer le cours des choses et pour agir, précisément, sur les conditions d’accueil. C’est ainsi que les chercheurs que nous sommes, et au regard de nos thématiques de recherche, décidons d’enquêter sur les modalités de soin des personnes migrantes, notamment au travers des problématiques de compréhension qui se jouent dans l’espace thérapeutique. Dans une perspective de santé publique, nous considérons en effet que le public migrant n’est pas un public spécifique, et ne doit donc pas être l’objet d’un dispositif dérogatoire au droit commun, mais un public à besoins spécifiques, au sein duquel certaines personnes nécessitent d’être accompagnées d’un interprète. L’impossibilité de parler dans sa langue est en effet un facteur reconnu de non recours aux soins (Béal et Chambon 2015), d’autant plus problématique que ce public a un taux de prévalence de certaines pathologies (notamment psychiques) plus importantes.
Très vite en 2015, l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) a mis en place un dispositif particulier, intitulé « Flash Asile », avec l’objectif de financer rapidement des recherches dans le domaine des sciences humaines et sociales sur les thèmes de la politique migratoire, de l’asile et du refuge dans toutes leurs dimensions (politiques, historiques, juridiques, sociales, économiques, démographiques, géographiques, …). C’est dans ce cadre que nous avons conduit le projet de recherche Remilas (Réfugiés, migrants et leurs langues face aux services de santé)1 qui s’intéresse aux difficultés d’intercompréhension dans les consultations et au rôle facilitateur des interprètes. Le projet se base sur des enregistrements audio et vidéo de consultations en santé et en santé mentale et sur des entretiens avec des soignants et des migrants, réalisés dans différents cadres professionnels : dispensaires, Permanences d’accès aux soins en santé (Pass), permanences d’équipes mobiles psychiatrie précarité (EMPP), permanence de l’association Médecine et Droit d’asile (Méda), Centre d’accueil de demandeurs d’asile (Cada). Tous ces dispositifs, qui existent depuis de nombreuses années, ont très vite atteint un point de saturation, qui peut, selon les professionnels qui y travaillent, mettre à mal la qualité des services et des soins qu’ils proposent. L’objectif de notre projet de recherche était aussi d’interroger l’ordinaire des pratiques. Autrement dit, cette “crise” a été le déclencheur d’une procédure particulière et le révélateur de situations et de pratiques qui préexistaient, et dont il s’est agi de révéler la teneur problématique et heuristique.
Les difficultés de ces situations tiennent pour partie à la complexité des procédures de la migration et de l’asile, ainsi qu’aux différences de langues, d’habitudes communicatives, de cultures, aux différences dans les représentations du corps, de l’esprit et du soin et dans les attentes, parfois décalées, des uns et des autres vis-à-vis de la situation. Le projet Remilas s’est attaché à étudier comment ces situations difficiles, dans des services saturés, avec des personnes en souffrance (en lien généralement avec l’exil et les traumatismes associés), étaient gérées par les participants dans la réalité de leurs échanges.
1. Un projet pluridisciplinaire et impliqué
La recherche Remilas a été pensée dès le début comme pluridisciplinaire. Cette pluridisciplinarité a permis de récolter un corpus varié et riche grâce à un travail de terrain dans différents services de santé. Ce travail pour collecter des “naturally-occurring data” est loin de se réduire à de simples questions techniques de prise de son ou d’emplacement des caméras ; il nécessite une collaboration réussie entre les professionnels et les chercheurs sur le terrain et il implique le respect de précautions juridiques discutées avec les différents établissements concernés2, qui peuvent être parfois sources d’embarras et de dilemmes (Traverso 2019, Jouin et Ticca à paraître).
Cette recherche a été à la fois impliquée et embarquée. Le corpus a pu être constitué grâce à une étroite collaboration avec les professionnels des dispositifs enquêtés3. La dimension participative de la recherche affichée dans le projet ne s’est pas résumée à présenter les acteurs de terrain comme des “faire valoir” des chercheurs. Il a fallu au contraire créer les conditions qui permettent d’enrichir les analyses du matériau et opérer des traductions, pour faire médiation entre les savoirs des chercheurs et ceux des acteurs de terrain. Tout au long de la recherche, mais aussi après la fin de l’enquête, les chercheurs du projet ont eu le souci de répondre aux sollicitations des professionnels de terrain, des acteurs engagés dans le soin et/ou le soutien des personnes migrantes. Des actions de sensibilisation et de formation4 ont permis à chaque fois d’échanger concrètement sur les pratiques.
2. Méthodologie
Nous avons établi une méthodologie fondée sur la réalisation d’un important terrain dans différents services de santé, et reposant sur des approches pluridisciplinaires croisées et des analyses collectives. Le corpus recueilli comprend des enregistrements audio et vidéo de consultations (91 consultations) et 34 entretiens (11 avec des intervenants professionnels en santé, 8 avec des interprètes et 15 avec des personnes migrantes ou réfugiées). Les langues représentées dans le corpus sont : albanais, anglais, arabe, arménien, espagnol, français, iranien, italien, macédonien, russe, serbo-croate. Les consultations sont de type psychologique, psychiatrique, médical généraliste, infirmier ou d’action sociale. Le corpus a été l’objet d’analyses individuelles (linguistique interactionnelle, sociolinguistique critique, microsociologie, analyses multimodales, psychologie et psychiatrie, etc.), aussi bien que collectives au cours de séances de data sessions régulières. Ces séances réunissaient l’équipe de chercheurs du projet (linguistes, psychologues, psychiatres, sociologues) et fréquemment des chercheurs extérieurs, utilisant ou non les mêmes méthodologies. En outre des séances d’analyse collective ont aussi eu lieu avec des professionnels de santé, notamment ceux qui avaient été enregistrés (équipe Mobile Psychiatrie Précarité de Savoie, équipe de médecins du Méda Lyon, équipe de la PASS de Savoie).
Entre linguistes et sociologues, nous nous sommes retrouvés dans une certaine proximité épistémologique, partageant un même souci de l’enquête. Que ce soit par l’analyse conversationnelle ou par des observations ou entretiens, nous avons mis en œuvre, dès le début du projet, un protocole d’enquête multisituée et, sur certains terrains, une analyse combinée qui a croisé différentes données issues des politiques publiques, de données ethnographiques et d’interactions filmées. Ces analyses sont articulées à celles d’entretiens dans lesquels les interviewés réfléchissent à leurs pratiques et les élaborent.
Nous partageons une perspective pragmatique, et portons attention aux objets, sujets et pratiques tels qu’ils se prêtent à l’enquête. Nous pratiquons une recherche soucieuse des pratiques, des savoirs et des modalités observables de leur mise en œuvre, plus qu’une recherche à visée théoriciste dans laquelle les faits d’enquête sont convoqués à titre d’illustration ou d’exemple. La complémentarité se loge donc dans la diversité des sites d’investigation (voir section 4), mais aussi dans celle des approches. Dans une perspective interactionniste, l’enquête porte sur des manières de faire et de dire, plus ou moins visibles, reconnues ou non, institutionnalisées ou non, mais aussi sur l’implicite des gestes, des présences et des attitudes. Et selon une perspective sociologique, il s’agit d’enquêter les savoirs pratiqués, mais également les conditions par lesquelles ils se rendent visibles, sensibles, perceptibles et pensables.
3. Récit, récits
La question du récit a émergé tout naturellement de notre travail de terrain puis des analyses des données Remilas, et elle a réémergé régulièrement au cours de nos rencontres avec d’autres chercheurs aussi bien qu’avec les praticiens. Il s’agit en un sens d’un lieu commun du travail sur et avec la migration, tant le récit, les récits, occupent une place importante dans la relation des migrants, réfugiés et demandeurs d’asile aux pays où ils se trouvent et où ils entament des démarches, et tant ils sont porteurs d’enjeux vitaux pour la trajectoire de vie qui va être la leur.
Commençons par quelques observations générales sur les études présentées dans l’ouvrage, avant de poser quelques repères sur les approches du récit dans les champs de la linguistique de l’interaction et celui de la sociologie.
Comme on l’a dit, les études qui suivent sont, au départ, étroitement liées au corpus Remilas, et, pour l’article de Natacha Niemants, à ses propres données et à son expérience d’interprète. Ainsi, la réflexion part des corpus et non d’un besoin ou d’une volonté de repenser le récit et ses approches. Autre point d’importance : plane sur toutes les interactions étudiées et toutes les réflexions proposées la grande ombre du récit d’asile. Ce récit administratif est celui qui est exigé de tout requérant pour sa demande d’asile. Les attentes sont fortes d’avoir un récit faisant état de persécutions ou de menaces de persécutions, pour correspondre au cadre de la convention de Genève. Ce récit a été beaucoup étudié et discuté pour en montrer le caractère violent et contraint, pour faire apparaître les dilemmes qu’il met en place pour les demandeurs, ainsi que pour les travailleurs sociaux et les soignants (entre autres Chambon 2008, 2017, 2018, d’Halluin 2012, Saglio-Yatzimirski 2018). Aucune des interactions du corpus Remilas n’est consacrée à la production et à la mise en mot de ce récit lui-même. Pourtant, bien qu’absent, il est omniprésent.
Nous avons travaillé sur des situations qui contraignent, qui rabattent les participants vers le récit, d’une part parce que les événements traumatisants et sévices vécus doivent être transformés en récits d’asile, récits exigés, et d’autre part parce que ces événements surgissent et resurgissent dans d’autres contextes que celui des démarches administratives, et sont parfois rapportés dans d’autres récits de la même histoire.
3.1. Etudes du récit en linguistique
Il ne peut être question de retracer la longue histoire de l’étude du récit en linguistique (Revaz 2009). Nous nous contentons de poser quelques éléments auxquels les articles font directement ou indirectement écho. Rappelons pour commencer l’importance des années 1960-1970 et des approches d’analyse structurale du récit, grammaire du récit, narratologie qu’elles ont vu éclore. Ces études ont forgé la définition du récit en cherchant à préciser ses traits caractéristiques, à le différencier d’autres genres, à inventorier différentes de ses formes et à identifier ses fonctions (voir des mises en perspective dans Revaz 2009, Filliettaz et Revaz 2006, Brès 1994). Ces travaux ont ouvert la voie à des recherches diversifiées et ils restent un point d’ancrage et de ressource fort pour l’étude du récit en linguistique et au-delà.
Dans cette même période, sont apparues les recherches sur le récit oral (Labov et Waletsky 1967, Labov 1972, Labov 1997) et sur le récit en interaction (Sacks 1974, 1978, 1992), qui ont donné droit de cité, notamment en analyse de discours, à des récits non écrits, non littéraires et non fictionnels. Le modèle labovien du récit avec ses six composantes (résumé ; orientation ; complication ; évaluation ; résolution ; chute) a donné lieu à un vaste ensemble de recherches, de discussions et de critiques (Adam 1984, 1992, Bres 1994, Vincent et Bres 2001, Laforest 2001). Comme le soulignent ces auteurs, le modèle de Labov a transformé les approches en ce qu’il donne une place, à côté des dimensions proprement structurales du récit, à ses dimensions énonciatives et subjectives (notamment avec la composante “évaluation”).
Les approches interactionnelles s’inscrivent dans la continuité de l’étude du récit oral, mais elles mettent l’accent prioritairement sur les phénomènes de co-construction, moins centraux dans le modèle de Labov. Cette différence de focus est notamment due aux types de données sur lesquels ces chercheurs ont travaillé : alors que les premières propositions de Labov et Waletsky (1967) portaient sur des récits produits à la demande d’un intervieweur (“were you ever in a situation where you thought you were in serious danger to get killed?”), avec l’analyse conversationnelle, on aborde des situations dans lesquelles l’introduction d’un récit par un participant provoque une transformation de l’organisation de l’espace interactionnel. Le récit conversationnel est le résultat descriptible d’une co-construction et parfois d’une négociation, au moment de son introduction (la notion de préface), mais aussi tout au long de son déroulement par la production de différentes formes d’indices d’écoute et d’évaluation (Jefferson 1978, 1984, Gülich 1984, Gülich et Quastoff 1986).
Un des effets de cet ensemble de travaux, outre que d’avoir accordé une légitimité académique à des productions narratives orales et ordinaires, est d’avoir conduit à aborder peu à peu, à côté des récits d’épisodes où l’on a risqué d’être tué (Labov & Waletsky 1967), des “dirty jokes” et des séries d’histoires drôles (Sacks 1978), des anecdotes à propos des petits événements de la vie quotidienne racontées à ses amis, dont de nombreux exemples sont étudiés par Goodwin (2004, 2007, 2015) ou d’autres types de récits qui correspondent peu ou prou au modèle du récit complet et clos, des formes plus hybrides, plus imparfaites et incomplètes, qui s’en éloignent (Laforest 2001, Filliettaz 2001, Traverso 1994, 1996, Vincent et Perrin 2001). Par leur ancrage dans les pratiques et les réalités sociales et praxéologiques, les récits dans les interactions sont de fait bien souvent sur les marges, voire les frontières, de ce qui a formé le coeur des études du récit. C’est ce que reprend la notion plus récente de “small story”: « an umbrella term that captures a gamut of undersrepresented narrative activities, such as tellings of ongoing events, future or hypothetical events, and shared (known) events, but it also captures allusions to (previous) tellings, deferrals of tellings, and refusals to tell » (Bamberg et Georgakopoulou 2008 : 381, voir aussi Georgakopoulou 2006).
À la même période des années 70 se développent aussi les travaux autour du récit de vie. Daniel Bertaux s’attache à cette période à faire reconnaître en sociologie la légitimité du récit de vie et des travaux le prenant comme objet central. Pour Bertaux, on a affaire à du récit de vie : « dès lors qu’un sujet raconte à quelqu’un d’autre, chercheur ou pas, un épisode quelconque de son expérience vécue » (2016 : 39). Les récits de vie ont été utilisés pour aborder des questions telles que l’insertion, la formation, l’acquisition des langues, etc., ainsi que les représentations des acteurs (Bertaux 2016, Demazière et Dubar 2004, Nossik 2011). Si, d’une façon générale, c’est le contenu plutôt que la forme proprement narrative de ces productions qui a intéressé les chercheurs, certains se sont au contraire attachés à les étudier en intégrant les “matérialités discursives”, les “dynamiques langagières” pour traiter, notamment, les questions d’identité (comme par exemple l’identité ouvrière à travers une enquête sociolinguistique dans les Houillères des Cévennes Bres 1993, les “sans” Guilhaumou 2004, entre autres).
Dans le champ des études sur la migration (Canagarajah 2017), beaucoup d’études sont basées sur des récits de vie sollicités dans des interviews. De Fina et Tseng (2017) en distinguent deux grandes catégories, celles qui se focalisent sur les représentations que les migrants construisent d’eux-mêmes, de leurs relations avec les autres personnes (out-groups), et celles qui abordent les récits comme une pratique propre aux institutions qui travaillent avec les migrants, les premières se centrant plus sur les contenus et les dynamiques interactionnelles, et les secondes plus sur les fonctions situées des récits.
3.2. Etudes du récit en sociologie
En sociologie, la réflexion a surtout porté sur l’importance du récit dans le cadre des procédures administratives, particulièrement la demande d’asile et les effets induits. Ce récit a pris de l’importance à mesure que la procédure est devenue sélective et individualisée. Il est aujourd’hui attendu du requérant qu’il expose un récit de vie qui le rapproche de l’archétype du réfugié « héros » (Akoka 2020). Didier Fassin et Estelle d’Halluin ont partagé, dans leurs travaux respectifs, ce constat, avec une dimension critique marquée (entre autres Fassin et d’Halluin 2005, Fassin et d’Halluin 2007, Fassin et Rechtman 2007, D’Halluin 2006, 2009, 2012). Ces chercheurs ont documenté comment, depuis les années 1990, le traumatisme du requérant devient la preuve conditionnant l’asile.
Du côté des sociologues des épreuves professionnelles, les réflexions ont porté sur l’activité, généralement d’intervenants sociaux, qui œuvrent à l’« aide au récit ». Confrontés à l’incertitude, les professionnels puisent dans différentes ressources pour s’en sortir. C’est la capacité à articuler ces différentes ressources face aux problèmes rencontrés qui constitue leur professionnalité, entendue comme l’art de continuer à exercer le métier, malgré toutes les difficultés à le faire (Ravon 2019). A partir de là, l’enjeu de l’analyse consiste à décrire le cheminement des acteurs dans l’action comme des trajectoires d’apprentissage, oscillant entre atteintes à la professionnalité (lorsque l’exercice de la profession est menacé) et étayages de la professionnalité, correspondant aux opérations collectives et réflexives par lesquelles les professionnels reprennent leurs actions. Les professionnels de l’action sociale qui travaillent dans les dispositifs de la migration ou de la demande d’asile, expliquent les démarches, remplissent les dossiers, et participent de manière active à la rédaction du récit… Le « chaînage » de cette évaluation a été investigué par certains sociologues (Chappe 2010). Evaluer le récit, ce n’est pas évaluer sa vérité mais sa capacité à convaincre, persuader celui qui in fine aura le pouvoir décisionnaire.
Autrement dit, ce que documentent des chercheurs en sociologie c’est comment les proches, les travailleurs sociaux et les militants interviennent dans cette « mise en récit », co-participent à prélever, compiler et organiser des séquences de l’histoire de vie (Voirol 2005). Cette perspective est d’autant plus présente chez les professionnels aujourd’hui que l’accompagnement social et sanitaire s’appuie de plus en plus sur un individu « autonome » et en capacité d’établir des projets, ciment du « pacte » de l’accompagnement (Astier 2009). Pour ce faire, elle s’appuie sur le récit que la personne est à même de faire de sa propre histoire, à même d’être comprise par ces intervenants.
Quant à la mobilisation des travaux de Paul Ricoeur (1983, 1990) sur le récit dans le champ de la sociologie, et particulièrement la conceptualisation de l’identité narrative, ils ont permis d’envisager l’agentivité de l’individu dans la composition de son récit, quitte à inclure la part fictionnelle, part en partie confisquée dans le cas des migrants. En effet en accompagnant la mise en récit, les intervenants occultent, ou tout du moins invalident, la part fictionnelle inhérente à la narrativité (Chambon 2017). Et c’est aussi généralement la mobilisation des travaux de Ricoeur, qui est à la base des réflexions en psychologie qui justifient la nécessité d’offrir des espaces d’écoute, désindexés des procédures administratives, d’autant plus quand le récit administratif est essentialisé et se doit d’être victimaire5.
Ce qui lie ces différents plans est l’intérêt porté à la mise en récit comme expérience, évidemment singulière, mais présentant aussi une dimension sociale marquée (de par les attentes qui y sont associées) et située. Ce sont la caractérisation et l’analyse de ces différents plans qui ont été à la base de l’enquête, et qui sont restituées dans ce livre.
4. Les formes du raconter dans l’ouvrage. Présentation des articles
Il existerait bien des manières de situer les récits étudiés dans l’ouvrage. Leurs points communs majeurs, comme nous l’avons dit, sont d’une part de s’éloigner du modèle canonique des études de narratologie et de se situer sur les marges, les franges, les frontières du récit. Il ne s’est pas agi pour les auteurs de revendiquer une définition du récit, mais plutôt d’explorer la substance des récits, traces ou bribes de récits, suivant les situations, en les indexant précisément à l’activité où ils sont produits.
Par ailleurs, les articles entretiennent un lien, d’une nature ou d’une autre, avec le récit d’asile. Il est envisagé en tant que tel, dans ses dimensions notamment contraignantes (Chambon, Le Goff et Bajjour). Il est également abordé à travers plusieurs de ses avatars : sa préparation (Niemants), la lecture à haute voix d’une de ses versions écrites au cours d’une consultation (Ricet et Noûs ; Ticca ; Biot et alii), le questionnement et l’évaluation de sa réception à l’Ofpra (Piccoli et Jouin). Plusieurs articles font apparaître une caractéristique forte de l’activité de raconter dans les différents cadres abordés (minimalement la consultation, l’Ofpra, la Cnda), au-delà de la contrainte du formatage administratif, c’est le fait qu’elle doit réussir à s’exprimer dans le format de “réponse à des questions” (Niemants). Ce format séquentiel imposé, fait peser lui aussi des contraintes très fortes sur les prises de parole, qui éloignent plus encore ces récits des manières plus “standard” de raconter (des éléments de) son histoire. En contrepoint, des récits plus “libres” sont étudiés dans deux articles, récits émergeant dans le fil de consultations en santé mentale, et qui peuvent avoir ou non rapport avec les causes et le parcours d’exil (Traverso, Haeringer).
Enfin, un autre point commun à tous les récits étudiés est la violence des faits et de l’expérience qu’ils rapportent. Violences provoquant la migration, violences au cours du long parcours d’exil, violences des tortures, des viols et des pertes. Violences à l’arrivée tout aussi bien : violence des situations, violence des démarches sans fin et sans succès, violences de devoir être plus victime encore qu’on ne l’est. Violences tout autant pour ceux qui écoutent les histoires, qui aident à faire sens, qui traduisent.
Dans l’organisation de l’ouvrage, nous avons choisi de présenter les articles en fonction du déroulement temporel des démarches de demandes d’asile.
L’article de Natacha Niemants, le seul qui ne repose pas sur le corpus Remilas et porte sur le contexte italien, aborde la façon dont les médiateurs et (dans une moindre mesure) les travailleurs sociaux cherchent à préparer les migrants qui ont fait appel d’une décision de refus de protection, à apporter de nouvelles informations relatives à leur histoire, qui seraient susceptibles de faire changer la décision. Cette préparation prend d’une part la forme d’une enquête qui vérifie l’existence dans le parcours du requérant de faits et documents susceptibles de faire pencher la balance (sévices et violences), et d’autre part celle d’un entraînement à gérer au mieux le format question / réponse, en évitant en particulier certaines réponses imprécises et donc risquées. L’article est en parallèle une réflexion sur l’expérience et l’engagement des médiateurs-interprètes.
Vanessa Piccoli et Emilie Jouin, dans une sorte de mise en abyme, étudient comment les requérants perçoivent la manière dont le récit qu’ils ont présenté, et plus globalement leur entretien, à l’Ofpra, s’est déroulé. L’analyse part d’une question régulièrement posée à ce sujet dans le cadre des consultations au Méda. Il fait ainsi entendre, de la voix même des migrants, leurs récits et les évaluations de cet entretien dont dépend leur futur, et les émotions qu’ils ont suscitées.
Vendredi Ricet et Camille Noûs, toujours dans le cadre du Méda, étudient une consultation en vue d’obtenir un certificat d’expertise médicale attestant des violences physiques et psychiques subies, comme une nouvelle phase de reconstruction et de réélaboration du récit d’asile. L’accent est mis sur le cadre de ces consultations, où se combinent le médical et le juridique et sur l’intertextualité existant entre divers les documents écrits qui accompagnent le requérant (récit pour l’Ofpra, dossier repris pour la Cnda, documents médicaux, etc.).
Anna Claudia Ticca, situant son travail dans le cadre des études de la migration, focalise ses analyses sur un moment de la consultation au Méda, l’auscultation physique. Elle étudie comment les traces sur le corps des requérants à la suite des sévices qu’ils ont subis contribuent au récit d’asile, et comment les moments distincts de récit, puis de monstration des blessures, opèrent une “désubjectivation” (Fassin et d’Halluin 2005) / “resubjectivation” des personnes.
Les trois articles suivants quittent le cadre du Méda, pour aborder d’autres contextes.
L’article de Nicolas Chambon, Gwen Le Goff et Nagham Bajjour, à partir d’entretiens, questionne l’embarras des intervenants en santé mentale vis-à-vis du récit administratif dans leur pratique clinique auprès des personnes migrantes. Il est attendu du travail psychologique qu’il permette à la personne de (se) raconter sa propre histoire. En filigrane, cet article nous interroge sur ce que peut être la perspective thérapeutique dans l’activité clinique, et le cadre souhaité et souhaitable pour la faire exister.
L’article de Véronique Traverso et Marie Bahuaud est une réflexion à deux voix (chercheure et praticienne) sur un type de récit attesté dans des consultations en psychothérapie, et son élaboration collective entre la patiente, la psychologue et l’interprète. L’article discute en quoi ces récits s’éloignent du récit conversationnel canonique (Sacks 1974, Jefferson 1978), du fait de la situation de psychothérapeutique où ils sont produits, et ainsi que par leur dimension nécessairement incomplète et inachevée.
Anne Sophie Haeringer se concentre sur des consultations en psychiatrie en mettant en évidence l’enchevêtrement des perspectives et des lignes narratives des différents protagonistes dans les consultations (médecin, patient, interprète). Elle se concentre sur les discontinuités et les écarts entre ces perspectives les considérant, non comme un problème qu’il s’agirait de résoudre, mais comme des moments, des lieux d’encombrement et d’embarras tout autant que d’écoute et d’hospitalité.
L’ouvrage se clôt par un article du docteur Biot et des médecins du Méda qui retracent l’histoire de cette association unique en France et expriment le point de vue de professionnels de la santé sur la question du récit d’asile.
5. Lieux d’enquête
Les articles de cet ouvrage s’appuient sur des matériaux provenant de différents terrains d’enquête du projet Remilas qu’il est important de décrire pour comprendre le contexte des interactions et des activités qui ont été analysées.
Médecine et droit d’asile
Des consultations médicales ont été filmées dans le cadre de l’association Méda, Médecine et droit d’asile, à Lyon. Un article reprend l’histoire de cette structure et présente les valeurs qui l’animent. Les médecins engagés dans l’association établissent des certificats pour les demandeurs d’asile et interviennent après le jugement de l’Ofpra, lorsque la demande d’asile a été rejetée et que des avocats, des travailleurs sociaux ou parfois les migrants eux-mêmes jugent opportun, pertinent ou nécessaire de produire un certificat médical pour étoffer leur dossier.
Au cours de la consultation, les médecins ont à leur disposition les notes de l’audition à l’Ofpra, le refus argumenté de l’Ofpra, un complément éventuel au récit, le dossier préparé pour le recours à la Cnda et, éventuellement, des éléments médicaux (d’autres certificats, des prescriptions médicamenteuses…). En s’aidant de ces documents, ils interrogent le patient sur son récit. Mais cette consultation médicale est un lieu d’écoute particulier, très différent des dispositifs d’aide au récit dans le cadre de la procédure d’asile. Si la rencontre n’a lieu, sauf exception, qu’une fois, contrairement à des consultations à l’hôpital ou en libéral, elle peut durer largement plus d’une heure. Il importe aux médecins d’obtenir parfois un éclairage différent et d’aller au-delà d’un récit maintes fois produit. Même si les médecins ne sont pas à proprement parler des « experts médicaux », ils situent leur action sur le terrain de l’expertise médicale.
Dispositifs de santé mentale et L’espace psychosocial
A partir des années 1980, les problématiques sociales ont été peu à peu convoquées au sein de l’institution hospitalière, avec la question de l’exclusion des soins des populations en difficulté. Ces réflexions ont conduit à chercher à faire accéder au droit commun les personnes en situation de précarité, à les faire rentrer dans un parcours sanitaire et social ayant pour visée l’insertion sociale, à travers de nombreux dispositifs adaptés, comme les Pass à partir de 1998.
Dans le champ de la santé mentale, les professionnels rencontrent toutefois des difficultés pour caractériser les psychopathologies des personnes migrantes, ce qui entraîne des remises en question de leurs modalités de travail (notamment cliniques). Dans ce contexte, de nouveaux dispositifs de santé mentale se mettent peu à peu en place, à l’initiative d’associations ou de services hospitaliers. C’est le cas de L’espace, lieu d’accueil, d’échange et d’expression ouvert aux personnes concernées par la migration, qui a ouvert ses portes début 2020, où des binômes de professionnels composés d’un psychologue et d’un médiateur-pair reçoivent les personnes migrantes sans considération de leur profil administratif.
Équipe Mobile Psychiatrie Précarité (EMPP)
L’EMPP est une unité hospitalière prenant en charge des personnes en situation de grande précarité, sans domicile (ou en centre d’hébergement), souffrant de troubles psychiques selon la circulaire du 23/11/2005. L’objectif affiché dans cette circulaire est de ne pas « se substituer aux missions de droit commun des équipes de psychiatrie publique dans le champ de la prévention, du diagnostic, du soin, de la réinsertion et de la réadaptation sociale ». Il s’agit de pratiques soignantes qui n’ont pour cadre d’intervention ni l’hôpital ni les équipements ambulatoires du secteur et qui impliquent donc que les soignants se déplacent. De fait, c’est un dispositif complémentaire, intersectoriel, situé à l’interface du dispositif de soins « de droit commun » et du dispositif social, afin de mieux appréhender la spécificité des besoins des publics concernés, tout en veillant à respecter le principe de libre-choix des patients.
L’équipe qui a été enquêtée dans le projet Remilas réalise des maraudes dans la rue et les squats, peut intervenir à la demande sur une situation ou dans un contexte particulier et tient plusieurs permanences sur le territoire départemental. Les captations vidéo ont eu lieu dans une même permanence auprès des infirmières, d’une psychologue et d’une psychiatre. Dans cette EMPP, les entretiens de première intention sont effectués par les infirmiers ou la psychologue. Ce sont des entretiens réalisés à la demande d’un organisme partenaire qui a été en contact avec la personne en difficulté. Des entretiens de suivi et des accompagnements peuvent être réalisés. L’entretien (sur rendez-vous) avec des psychiatres arrive ainsi dans une deuxième phase, soit pour une situation compliquée nécessitant un diagnostic ou une orientation, soit pour la prescription d’un traitement
La pratique clinique dans les EMPP est assez particulière. L’objectif des intervenants est de créer un espace d’investissement subjectif. En santé, mettre en mots une histoire potentiellement traumatique peut participer du travail thérapeutique, sans que cela ne se confonde forcément avec d’autres récits, notamment administratifs.
Les membres des équipes de ces terrains ont amplement contribué à la recherche Remilas. Ils ont avant toute chose permis qu’elle ait lieu en donnant leur accord pour être filmés et interviewés, mais aussi en acceptant de collaborer aux réflexions et aux discussions scientifiques. Ils sont présents dans l’ouvrage, non seulement comme acteurs des extraits de consultations analysés ou comme personnes interviewées dans les entretiens étudiés, mais aussi comme auteurs et co-auteurs des articles. Nous les remercions pour leur confiance, pour leurs savoirs, qu’ils ont partagés, et pour leur engagement.
Cet engagement traverse aujourd’hui de nombreux lieux de soin, lieux d’action sociale, centres de recherche… La diversité des contributions et des analyses de cet ouvrage est une invitation à réfléchir à ce(ux) qui nous relie(nt). Cet ouvrage suggère que c’est plus dans la complexité des relations, dans le détail des interactions, que dans la simplification analytique, voire idéologique, que réside la teneur politique (et la puissance d’agir) des métiers de l’intervention sanitaire et sociale. Les récits, leurs frontières, leurs aspérités, sont autant de prises à la rencontre, voire à la solidarité, entre toutes les personnes concernées, qu’elles soient migrantes, soignantes ou chercheures.
Notes de bas de page
1 http://icar.cnrs.fr/projet-remilas/. Nous remercions aussi le Labex Aslan (ANR-10-LABX-0081) qui a contribué au financement de certaines réalisations du projet Remilas.
2 http://www.icar.cnrs.fr/sites/projet-remilas/corpus
3 Des collaborations avec d’autres équipes de chercheurs ont permis de donner corps à l’interdisciplinarité du projet, de confronter et articuler des terrains d’analyse. Ce fut le cas avec Christian Licoppe et Nathalia La Valle, sur le versant sociolinguistique avec l’analyse de séances en visioconférence à la Cnda dans les territoires d’Outre-Mer ; ou encore avec Estelle d’Halluin, avec des analyses conjointes de matériau de recherche. C’est aussi Carolina Kobelinsky, anthropologue qui a travaillé sur les récits autour de la mort aux frontières auprès de migrants avec qui nous avons pu échanger sur nos travaux respectifs. Ce sont aussi Natacha Niemants et Orest Weber qui ont partagé avec nous leurs données et leurs questionnements. Nous les remercions chaleureusement pour tous leurs retours.
4 Entre autres réalisations, le dispositif théâtral de sensibilisation du grand public “Une communication (im)possible”, (https://aslan.universite-lyon.fr/videotheque/une-communication-im-possible–111310.kjsp), l’application ODIMEDI, formation en ligne pour améliorer la communication entre interprètes, professionnels de la santé et patients (https://odimedi.fr/), la mise en place du Diplôme Universitaire Dialogues. Médiation, interprétariat, migration, à l’université Lumière Lyon 2 en 2021 (https://www.orspere-samdarra.com/evenements-et-formations/diplomes-universitaires/du-dialogues-mediation-interpretariat-migration/)
5 Il convient de dire un mot d’une autre dimension, très présente aujourd’hui dans les sciences humaines et sociales, qui est absente du projet Remilas (et donc de cet ouvrage), celle de l’expression des personnes migrantes par elles-mêmes. Le projet Remilas a toutefois conduit à ouvrir ces autres pistes de recherche avec des projets suivants, notamment le projet « Tiers-intervenants dans l’accès à la santé et au numérique » (TIASAMN) fondé sur l’analyse de groupes d’auto-support, comme les groupes d’entraide mutuelle (GEM). Dans ces dispositifs, l’émancipation en passe par la réappropriation d’une parole et par la publicisation d’un soi stigmatisé, problématiques qui portent l’empreinte des « narrative studies » (Bruner 1991, Herman 1997, Patron 2018).
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