Introduction
Longtemps j’ai rêvé d’écrire à propos de l’aventure Un Chez-soi d’abord, ce programme de logement d’abord qui permet à des personnes sans domicile et vivant avec des troubles psychiatriques de devenir locataire ou sous-locataire d’un appartement dans un délai très bref et de bénéficier d’un accompagnement basé sur l’approche du rétablissement, réalisé par une équipe pluridisciplinaire. J’ai toujours écrit, en premier lieu pour bénéficier de l’effet cathartique de l’écriture mais également pour lutter contre ma peur de l’oubli des événements et donc pour sécuriser mes souvenirs. Cette passion m’a permis de ne jamais trop souffrir face à la nécessité des services de produire en permanence d’innombrables documents : projets d’établissement, cahiers des charges, réponses à des appels à projet, rapports d’activité et autres écrits professionnels. Je me souviens de l’étonnement de Romain, mon directeur et binôme inestimable au sein d’Un Chez-soi d’abord, lorsque que je lui ai présenté le premier rapport d’activité en 2020. C’était l’année suivant celle du lancement du programme sur le territoire lyonnais et il m’a dit « je sais que tu as envie de tout raconter et c’est chouette mais ça ressemble plus à un mémoire qu’à un rapport d’activité, c’est long Marion, très long ! ». Et depuis, chaque année, le challenge est de réduire la taille de ce document, en vain.
Malgré ce contexte propice, écrire et raconter le Chez-soi d’abord n’a pas été chose aisée, justement en raison de la richesse de l’objet et de la diversité des sujets à explorer : « Par où commencer ? Que vais-je choisir de regarder ? » Ces interrogations étaient omniprésentes et vertigineuses il y a deux ans. J’aurais voulu tout aborder dans le détail et réaliser une recherche sur l’ensemble des sujets : la gouvernance partagée au sein de l’équipe qui était pour moi un idéal politique absolu que l’on touchait justement du doigt; l’accompagnement en multiréférence et le travail en binôme qui semblaient régler beaucoup de difficultés que l’on retrouve au sein des équipes en souffrance; la pair-aidance dont la pratique m’apparait aujourd’hui comme une évidence; la singularité de l’accompagnement des personnes vers le rétablissement mais également le dévoilement de soi auprès des collègues et des locataires et la place des émotions. La liste était longue. […]