Introduction
Il y a deux manière de faire de la lumière, être la bougie ou le miroir qui la reflète.
Il est des sourires et des larmes que mes mots ne pourront décrire, et j’espère dans ce
travail de mémoire rendre une parole, des mots, des armes, à ces femmes que j’ai rencontrées, qui m’ont aussi permis de me rencontrer dans ma pratique. En préambule, il me semble essentiel d’expliciter ce travail comme une recherche, une pause, une respiration permettant des hypothèses. Je ne prétends détenir aucune vérité et chaque parcours des personnes que j’ai accompagnées est ici narré par un prisme et une subjectivité. Je crains par l’écriture d’essentialiser, d’enfermer. La notion même d’accueil, dans mon métier, passe par une posture ouverte qui permet à l’autre de déposer ou non une part de son intime, de son projet, de sa compétence. Ecrire les parcours de Precious, Favour, Mercy, Patience, Grâce… Pour le faire j’ai besoin de leur rendre la possibilité de dire « ce qui est écrit là n’est pas moi. C’est une perception de moi, à un instant T et de mon histoire ». Récit de vie qui a lui-même été ré-écrit tant de fois. Ré-écrit par les proxénètes, modelé par la peur de se dire, par la pression de répondre à des attentes, par la patience d’un écoutant qui ne prenait aucune note quand elles se racontaient. Toutes ces rencontres, ces expériences, ces injonctions à être, dire, faire ; viennent témoigner d’une complexité à saisir l’Autre, le comprendre. C’est ce qui m’anime tant dans mon quotidien de travail. Ne pas projeter, faire avec la matière visible, éclairer l’invisible et attendre de voir si quelque chose se passe.(…)